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Alternative


Trop souvent, dans les affaires, en politique, nous entendons cette phrase rituelle : « il n’est pas d’autre alternative ». Outre qu’elle constitue un discutable argument d’autorité, elle manifeste une singulière et tout aussi regrettable faute de français.

Qu’est-ce en effet qu’une alternative ? Ce mot, comme toute sa famille (alternatif, alternance, alterner) vient du latin alternus qui signifiait « un sur deux », lui-même dérivé de alter « autre ». Une alternative est une situation qui offre deux possibilités, et seulement celles-ci.

Émile Littré, dans son dictionnaire, a fort bien décrit les choses : il n’y a jamais qu’une alternative, écrit-il, composée de deux éléments entre lesquels il faut se décider. On vous proposera donc une alternative ; vous choisirez dans cette alternative.

En d’autres termes, vous ne pouvez pas dire : « je ne vois qu’une alternative, nous devons accepter ». De même il est incorrect de déclarer : « il n’y a que deux alternatives, accepter ou refuser ».

C’est clair, ou du moins c’était clair jusqu’au XXe siècle. Sous l’influence de l’anglais alternative, qui signifie « solution, possibilité », le mot français a pris cette signification. L’on rencontre désormais alternative au pluriel et désignant des options. Marcel Proust lui-même écrit : « Il y a ainsi certains états moraux, et notamment l’inquiétude, qui ne nous présentent que deux alternatives ».

Cet anglicisme est fâcheux, car il fait disparaître un sémantisme utile.  Le français a besoin d’un terme pour désigner une situation présentant deux solutions. On peut certes dire un couple d’options, une double possibilité. Mais on peut et doit également utiliser alternative au sens propre. Revenons hardiment à ce bel emploi ! Par ailleurs, pourquoi pas ne pas redonner vie au délicieux dilemme ?