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Langue française

Accuser réception

Qu’a-t-elle fait, cette pauvre réception, pour qu’on l’accuse ?

Le verbe accuser provient du latin accusare, formé sur le substantif causa.

Ce mot latin désignait la cause  ; dès le latin il a pris le sens dérivé de « procès ». D’où le sens le plus fréquent, en français, du verbe accuser, à savoir « supposer quelqu’un coupable », l’incriminer, voire l’inculper. On dit de nos jours « mettre en examen », réforme juridique lexicale qui respecte le principe d’innocence.

Causa, cependant, désignait en général la cause, c’est-à-dire « la raison, le motif ». Accuser possède par suite le sens de « signaler, révéler ». On peut dire ainsi :  son visage accusait la fatigue (il la trahissait) ; il accuse le coup  (il montre, par sa réaction, qu’il est affecté ).

Accuser est donc, dans ce second emploi, un synonyme de montrer : ces roches accusent une formation quaternaire. Plus précisément, accuser peut prendre le sens de « montrer activement, faire ressortir » : la lumière accuse les contours du relief, une robe moulante accuse les formes.

On comprend par suite qu’accuser en viennent à signifier « annoncer ». En matière postale, on accuse réception d’une lettre ou d’un paquet : par là-même, on prévient l’expéditeur de la réception de son envoi. Il reçoit alors un accusé de réception, preuve manifeste que son envoi a atteint son destinataire.

Dans cet emploi, nulle culpabilité supposée, mais l’affirmation seulement d’une nature ou d’une identité révélée. N’attribuons donc pas d’interprétion fâcheusement xénophobe à une expression telle qu’un trait physique très accusé…

À propos de l'auteur

Articles

Universitaire, Bernard Cerquiglini fut professeur aux universités de Paris, Bruxelles et Bâton Rouge. Il est l'auteur d'une douzaine d'ouvrages. Haut-fonctionnaire, il dirigea l'Institut national de la langue française et fut délégué général à la langue française et aux langues de France, puis recteur de l'Agence universitaire de la Francophonie. Il présente l'émission quotidienne "Merci professeur" sur TV5Monde et est membre de l'Ouvroir de littérature potentielle (Oulipo).
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