Point de vue des économistes

Les banques sont des miroirs... des contradictions de notre société

Comme à chaque  crise, le procès « des Banques »  s’instruit  sur la place publique, à grand renfort médiatique de débats des nouveaux Saint-JUST :

Ceux de la Classe Politique  qui en «  même  temps » appellent à leur solidarité et se servent d’elles  sans  vergogne comme  écran  de fumée  pour masquer leurs propres  responsabilités.

 Tout autant de gémissements, du coté des syndicalistes autoproclamés en « autorité morale » à défaut de légitimité démocratique, aux mots  jamais assez durs contre les « ..  spéculateur… ».

Ils oublient ainsi au passage qu’avec les taux d’intérêts négatifs et la réglementation européenne spoliatrice, le  système  bancaire  français est le moins  rentable  du monde   jusqu’à décider de  grands  réseaux ( HSBC ) et leurs actionnaires à quitter  l’hexagone..

 Demain il faudra bien que le consommateur paie enfin le vrai prix des services de l’ Industrie bancaire,(réseaux sécurisés,  traitement des chèques, distributeurs de billets, sécurités monétaires etc) dont les coûts trop longtemps masqués par l’aubaine de la « transformation » ( des  dépôts des clients  en  crédits) ont été minimisés par les autorités politiques en toute  démagogie. 

      L’autre grande obsession syndicale, partagée par «les populistes de tous poils » est la haine  des  actionnaires et de leurs  dividendes .

  Certains, se croient investis d’un pouvoir de recommandation de bonne  gouvernance aux «  grands  groupes »  comme  s’ ils pouvaient  avancer à coté de leur « métier  de  permanent  syndicaliste  » la moindre expérience réussie  dans la  gestion et la  gouvernance   du  secteur productif … ( alors que que 97% des salariés  du secteur privé ne leur font pas  confiance !!!).

Au passage  «  ils tirent contre leur « propre camp » , car c’ est bien  dans les  grands groupes  que l’actionnariat salarié  est le plus développé.

   De surcroît ils méconnaissent la  réalité  du partage de la valeur par le  secteur productif :

    91%**pour « les Parties Prenantes » (71% pour les salariés , 20% pour l’Etat ) et la plus petite part… 9% pour les  actionnaires … qui en sont il  faut le  rappeler, les « Propriétaires« , droit  sacré constitutionnellement (.** étude de  L’Institut MOLINARI août 2018)…

    Que peut nous dire un tel consensus dans un pays ou tous débats économiques ne peut  s’appuyer que sur des  dogmes , des  croyances et  déclenchent controverses et passions..

La première piste de réponse est historique:

une culture nationale «d’héritage révolutionnaire » : contre les bourgeois, les riches,  les instruments de leur pouvoir, « l’argent et les banques » :

Si on ajoute à cela 50 ans de doctrine économique universitaire majoritairement d’inspiration marxiste dont il résulte une inculture économique de la société civile assez terrifiante, on comprend le retour de cette tentation du bouc émissaire  qui frappe les Banques.

Mais à bien y regarder, les banques françaises n’ont rien à se reprocher qui puisse justifier ces propos haineux, et cette volonté « de les mettre au pas », ou sous tutelle;

Victimes de la crise mondiale de 2008, elles ont été, d abord taxées à travers le soutien à leur trésorerie à hauteur de 2 milliards d’euros ce qui est un comble :

Sauf exception, pour quelques établissements, elles n‘ont enregistré que des dégâts collatéraux du système installé par les dérives des banques Anglo-saxonnes( subprimes et autres toxicités), d’ailleurs elles sont sorties renforcées relativement à leurs consœurs Anglo-saxonnes de la première crise : quant à la crise de la dette, peut-on sans être ignorant ou totalement hypocrite, leur reprocher d’avoir donner la priorité à leur mission première de financement de l’économie, en répondant aux demandes insistantes de financement des Etats européens (ayant passé les stress test de l’entrée à l’Europe).

Que l’on sache les Etats sont des acteurs majeurs de l’économie, dirigés en principe par des hommes politiques responsables et démocratiquement élus en charge des finances publiques et de la dette : la faute à qui si aujourd’hui ces pays sont en situation de grande fragilité ?

Puis, se fut le tour des « régulateurs européens » de faire valoir sur le dos des banques, leurs interprétations hasardeuses  «  anti crise systémique » :

plus de fonds propres, plus de règles, plus de normes, ..las, ces experts sont en retard d’une guerre de la finance :

aujourd’hui « les Shadow-banque », les fonds apatrides, hedge funds, installés dans des paradis fiscaux, etc… (c’est à dire l’ensemble des acteurs qui échappent au périmètre «repérable et régulable» constitué par les banques et établissements financiers dépendant d’un cadre institutionnel) pèsent … dix fois le Pib américain !!!

C’est à dire des volumes considérables « totalement décorellés des mesures de contrôles classiques, et qui bien souvent se nourrissent des trous noirs que crée une régulation partielle et donc improductive.

 

Tel est donc ce qui se cache derrière ce déni « politique » de réalité : une crise de solvabilité des ETATS  du monde occidental dont les banques sont à la fois les victimes et les bouc émissaires, dans ce sens les banques sont des miroirs de la Société et du temps dans laquelle elles évoluent :

  • les miroirs d’une forme de décadence intellectuelle et morale, venue d’abord du monde Anglo-Saxon, copiée partiellement par le reste du monde, qui a laissé par complicité objective d’intérêt, ses places financières, Wall Street et la City, échapper à tout contrôle, avec des instruments, les bonus, et des acteurs « deus ex machina », les traders, exacerbant la cupidité et les visions court-termistes.
  • les miroirs aussi d’une pathologie du politique, qui par ses indécisions, ses atermoiements, et son insuffisance de courage moral à alimenter la crise de solvabilité des Etats, en entretenant l’inquiétude des marchés, et en s’évertuant en toute hypocrisie, à laisser croire à l’opinion, déjà largement dogmatiquement convaincue, que la crise de la dette vient de l’action des banques,
  • les miroirs enfin de l’absence de mémoire de nos dirigeants qui avec une tendance masochiste aggravée, ressortent toujours les vielles recettes, pourtant usées par l’Histoire jusqu’à la corde (qui, espérons le, comme le prétendait Marx, ne servira pas à les  pendre !) :
  • plus de contrôles et plus d’ETAT.
  • On voit mal  comment il pourrait en aller autrement de ce qui hier a fait naître les plus belles Berezina financières sous la direction et le contrôle des représentants de l’Etat ou issus de « l’école » de l’administration : le crédit lyonnais et Dexia,  (avec des  exigences de rémunérations annexes qui , n’ont rien eu à envier aux pires pratiques du secteur  privé. ».

Les tenants du « capitalisme totalitaire », versus national, dont la CHINE est le grand champion, devraient avoir en tête cette autre  réalité «..les banques dans ce système consentent des prêts sur injonction du parti, lèsent les épargnants au profit des entreprises publiques… »…. voila le modèle.

Aussi, serions nous  bien inspirés de trouver des solutions plus démocratiques que la mise sous tutelle des banques françaises :

 -les banques sont des miroirs de la société dans laquelle elles s’insèrent en acteur central de l’économie :

– il n’y a pas de pays prospères sans banques prospères, rentables et fortes, ce qui suppose des fonds propres importants donc des profits et ..des actionnaires .. pas  de dividendes pour rémunérer le risque de l’investissement… pas  d’ actionnaires !!!

Rien n’est plus contre-productif que la logique du bouc émissaire dans une stratégie de long terme : s’en prendre à son système bancaire dont la puissance est l’un des instruments de la souveraineté des Etats, c’est agir contre ses propres intérêts,  c’est se tromper  de guerre contre  «  l’ennemi  invisible »..  c’est à dire cette lâcheté collective qui consiste à passer « la patate chaude » aux prochaines générations .. dettes  , retraites ,  etc..

Le bouc émissaire selon la légende, était envoyé dans le désert pour expier les péchés du peuple : mais pour traverser les terres arides qui s’annoncent pour la prochaine décennie, la le risque serait de se laisser tenter par les « petits lapins sortis » du chapeau des adeptes de la baguette magique, dont les détracteurs des banques sont les premiers représentants.

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Langue française

Conjoncture et conjecture

Ne craignons pas d’être un peu puriste ; à bon escient du moins.

Je n’aime pas, mais alors pas du tout, que l’on confonde la conjoncture et la conjecture.

Certes les deux mots sont savants, et ils se ressemblent ; mais leur emploi et leur sens n’ont aucun rapport.

Dans conjoncture, il y a fondamentalement l’idée de joindre. La conjoncture, c’est au départ la liaison d’événements concomitants, dans une situation donnée. On parle de fatale ou d’heureuse conjoncture ; on traite de la conjoncture politique, syndicale, etc. Cependant, depuis le XXe siècle, le sens de conjoncture s’est précisé ; ce terme désigne habituellement la situation économique ou financière ; on parlera, par exemple, de fléchissement de la conjoncture.

Rien à voir avec la conjecture, qui fut empruntée au XIIIe siècle au latin conjectura, de cum « avec » et jacere « jeter », c’est-à-dire « le fait de jeter ensemble », et donc de combiner dans l’esprit, d’imaginer. Une conjecture, c’est une idée que l’on s’est formée. Si elle n’est pas vérifiée, on parlera de conjecture chimérique, ou gratuite. La conjecture en somme, c’est une hypothèse que l’on forme quand on est dans l’incertitude.

La conjoncture est donc claire : ces deux termes n’ont rien à voir. Pourquoi les confond-on ? Je me perds en conjectures.

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Point de vue des économistes

Le secret néolibéral - Jean-Luc GREAU

Pour Jean-Luc GREAU, auteur reconnu et engagé, grand observateur du Capitalisme et de ses dérives réelles ou supposées, savoir si l’expérience néolibérale que nous connaissons depuis quarante ans est positive ou non reste un faux débat, celui d’un prétendu retour aux sources du Capitalisme… D’un coté, en effet, les idéologues néolibéraux ne se cantonnent pas seulement à prôner les avantages du libre-échange, mais le présente comme le moyen décisif de surmonter les nationalismes. « Au nom d’une coopération volontaire des peuples, alors même qu’ils nous ont été imposés par le gant de fer des grands agents financiers et, que les juges peuvent démanteler pierre à pierre les Etats » et que, de l’autre, l’expérience soviétique s’est appuyée sur une  représentation du monde en noir ou blanc pour disqualifier ses critiques « Incriminer la propriété et le marché et placer le travail humain sous le gant de fer du Parti et démanteler les institutions de la démocratie bourgeoise ».

Le Néolibéralisme n’a donc pas inventé cet esprit manipulatoire qui fait florès dans chaque régime et chaque époque de « civilisations ». Mais son « secret » semble donc tenir sur « une double main mise des financiers et des Juges, sur les Entreprises et les Etats, dont les pouvoirs économique, financier et législatif ont été réduits a leur portion congrue ». Mondialisation et financiarisation allant ainsi de pair pour la meilleure création de valeur de l’actionnaire… Pour l’auteur, le système financier nouveau qui en résulte porte en lui les germes d’une révolution bancaire entraînant la déresponsabilisation des banques commerciales et une forme de privatisation des banques centrales… Dans ce nouvel et brillant essai l’auteur plaide pour mettre fin à cet engrenage et propose des pistes originales pour y parvenir, car « la morale chasse le politique et ouvre des espaces de domination pour les bureaucrates ». Jean-Luc  GRÉAU, ou comment  se soustraire à l’emprise néolibérale, vaste et fertile débat !

Gallimard – 156 pages – 15 euros

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Point de vue des économistes

L'économie à l'épreuve des faits - Francisco SARACENO

« ..Comprendre les controverses du passé pour éclairer les défis de la Société », telle  est la noble tâche à laquelle s’attache l’auteur, en publiant ce petit fascicule aussi précis que précieux pour tous publics.

Adoptant une approche « historique », Francesco SARACENO, enseignant dans de prestigieuses grandes écoles européennes (OFCE, Sciences- Po, la SEP, etc.),expose de façon rigoureuse et très documentée le « combat des idées » qui ont traversé, au cours des siècles, l’ économie et… les économistes :

Le  développement de la macro-économie, ses régulations, par les marchés et/ou les autorités publiques, mais aussi les affrontements sans cesse réactualisés des « écoles » de pensées, néoclassique, keynésienne, post moderne etc…

Mais l’un des grands intérêts de  cette parution réside dans ses apports, factuels, sous forme de « focus » qui lient l’ histoire des idées et les faits, avec les débats de politique économique contemporaine. En effet, bien souvent dans les commentaires médiatiques  et, (pire, académiques compris), la réalité et les faits, mesurables et mesurés, s’effacent devant le dogmatisme et le « ressenti », pour obscurcir la compréhension de la transformation perpétuelle que les économies éprouvent.

Bref, une épreuve de vérité, susceptible sur bien des points de tempérer l’observation récente et paradoxale du prix Nobel d’économie Paul ROMER  « Il faut réduire l’influence politique des économistes… car ils ne peuvent pas prétendre savoir ce qui est juste ».

Mais preuve est faite qu’ils sont aussi en capacité d’apporter des éléments objectifs de décryptage des choix possibles au plan politique et économique ,en toute humilité.

Ce n’ est pas le moindre des mérites  du professeur SARACENO, et de l’école Supérieure de la Banque, qui, avec René DESBIOLLES, et la Revue Banque sont à l’initiative de cette nouvelle et prometteuse collection, dont le titre « Transformation » est déjà tout un programme.

Revue BANQUE – 132 pages – 20 euros


Francesco SARACENO est directeur adjoint du département de l’Ofce-Sciences-Po, auteur et enseignant notamment du Master Affaires Européennes à Sciences-Po

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